
19 Juin Egon Schiele.
Après Matisse et Cocteau, Egon Schiele est le troisième artiste à m’avoir captivé. C’est donc avec lui que je clos un premier chapitre de la série influence.
J’étais en terminale et je l’ai découvert lors de l’exposition Klimt, Schiele, Moser, Kokoschka au Grand Palais, l’hiver 2005-2006.
C’est une exposition qui m’avait énormément plu. J’avais déjà un certain goût pour les artistes de l’expressionisme allemand et ceux s’en rapprochant. Mais en dehors de Klimt, je n’en connaissais aucun. A l’époque j’ai été assez marquée par le travail de Kokoshka _ enfin plus par son histoire avec sa poupée_ mais sans commune comparaison avec celui d’Egon Schiele. Moser, ne m’a laissé aucun souvenir.
Comme je vous l’ai écrit la semaine dernière, je suis plutôt du genre à aller à l’essentiel dans une expo. Ça m’arrête ou je passe. Et ce jour-là, ce qui m’a arrêtée, ce sont ses mains.
Les mains d’Egon Schiele.

Pour la première fois de ma vie, je ressentais ce qu’on appelle un « choc esthétique » (expression que je n’ai appris que bien plus tard). Je visitais donc tranquillement l’exposition quand d’un coup je me suis arrêtée. J’ai changé de trajectoire et suis allée directement vers un tableau. Plutôt vers des mains. Le tableau je ne m’en souviens plus du tout, mais les mains m’ont subjuguée. Je n’ai pas fait comme à l’expo de Cocteau où je revenais sans cesse sur mes pas, tant je voulais mémoriser tout ce que je voyais. Non, là, j’étais simplement envoûtée. Je me suis arrêtée et j’ai contemplé. C’est peut-être même la première fois que je « contemplais » un tableau.
Je ne le regardais pas pour retenir, apprendre quelque chose, pouvoir en parler, m’en souvenir pour exploiter de nouvelles découvertes dans mes futurs travaux. Juste je regardais et j’admirais. Le temps c’était arrêté.
Beaucoup y ont vu la mort, j’y voyais la vie.
J’avais lu quelque part que Titien (il me semble mais je n’y mettrais pas ma main à couper, car je réalise que je lui attribue à peu près tout ce dont je ne me souviens pas) conseillait d’utiliser du rouge, du vert, de l’ocre et un peu de bleu pour rendre la couleur chair.
J’ai tenté plusieurs fois pour comprendre comment toutes ces couleurs ensemble pouvaient rendre quelque chose d’aussi subtil que la chair et non pas un infâme caca d’oie. J’avais la réponse sous les yeux.
Ceux avec qui j’ai parlés y perçoivent la mort parce-que les corps sont décharnés, torturé. Les expressions tristes où sévères. Moi j’y percevais la vie qui coule dans les veines. Une vie fragile contenue par une fine enveloppe de peu encore plus fragile. Et dans cette vie qui coule, je n’y voyais pas que le sang et les veines mais les passions et le mouvement.
Tes mains sont belles comme un tableau d’Egon Schiele.
Lorsque j’ai dit ça à mon amourette de l’époque, il n’y avait pas internet à tout va sur les téléphones. Il a été très flatté. Le soir, il a cherché qui était Egon Schiele et m’a envoyé un texto pour me demander si je trouvais sincèrement ses mains aussi moches que celles du tableau…
Influences directes.
Maintenant que j’y pense, ça me semble étrange mais en dehors de Matisse, je n’ai étudié aucun des deux autres artistes de cet étrange triptyque. Pourtant j’ai plusieurs livres sur Cocteau et lorsque je suis arrivée aux Beaux-Arts je comptais étudier Egon Schiele à travers le burin. Idée qui n’a rien donnée.
L’année dernière je suis allée voir l’exposition Egon Schiele à la fondation Louis Vuitton. Pour rien au monde je n’aurais raté ça. Mais j’ai été terriblement déçue. Je ne sais pas pourquoi exactement. Le travail de l’artiste ou la scénographie ? Toujours est-il qu’en sortant de là j’avais un sentiment de redondance.
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