Un monstre derrière la porte.

Je n’écris pas aussi souvent que je le devrais. Ça ne veut pas dire que je ne travaille pas. Je ne travaille pas assez. Jamais assez même si pour certain je travaille beaucoup. Je ne suis toujours pas redescendue à l’atelier. Parfois je passe devant la porte quand je suis à la recherche de mon chat et je regarde cette porte que j’ouvrirai bientôt mais pas maintenant. Bientôt car j’en serai obligée. Je la regarde avec inquiétude. Qu’y a t-il derrière ? Combien d’araignées, de monstres, rôdent à l’atelier? Il est arrivé que je prenne mon courage à deux mains et ouvre la porte à la volée pour surprendre un monstre la main dans le sac. Au moins j’aurais une bonne excuse pour ne pas y retourner. Mais chaque fois j’y découvre un atelier à l’abandon. La dernière expo n’a toujours pas été rangée. L’odeur de l’encre a disparue. Le territoire est propice aux envahisseurs. D’ailleurs certains viennent en visite, faire du repérage. Et ils doivent être terrifiants puisque vendredi soir lorsque je suis rentrée j’ai trouvé mon chat terrifié qui n’osait plus sortir de sa cachette. Si j’avais eu la taille adéquate j’y serai bien rentrée dans cette boite de carton tapissée de polystyrène réduit en miettes. Je m’y serais engouffrée, et faite portée  disparue jusque fin novembre. Novembre le mois de ma prochaine exposition. Exposition qui me terrifie. D’ailleurs j’ai largement passé le stade de l’indigestion, j’en suis maintenant à une crise d’expophobie. Pourtant je suis retournée voir le lieu. Il a rétrécit. Ou plus exactement il a repris sa taille initiale. Dans ma mémoire il s’était démesurément agrandit, avec le temps, avec l’angoisse.

Le délais approche. Il est même déjà dépassé pour ce qui est de la création des flyers. Alors j’ai fait un effort. J’ai ouvert la porte. Attendu quelques instants, rentré la tête dans les épaules, traversé l’atelier en courant pour attraper des pigeons. Ceux de l’envolée. Maintenant ils sont dans mon sac à main. Dans mon porte monnaie il y a des poissons et une lune. Pas beaucoup d’argent. Ce dernier ne fait que passer. Dans mon sac il y a un autre sac qui protège un enfant qui dort. Cet enfant à un jumeau qui rêve bien au chaud dans mon canapé sous les gazouillis des perruches. L’atelier est un no man’s land. J’ai peur de ce qu’il présage. Alors pour oublié je croque, je coupe, je couds ou je brode. Je créer le plus possible pour oublier ce que je que je dois créer, accrochée à quelques fils pour libérer mon esprit.

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